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La voix humaine - Petite comédie du réveillon

Publié le par Carole

     Dire qu'elle avait tout préparé si soigneusement. Tout pensé tout prévu. L'éclairage, les guirlandes, les bougies parfumées. Les cocktails aux agrumes, les canapés au crabe corsés au paprika, les tranches de saumon fumé bio roulées en pétales de fleurs, les petites griottes confites postées par avion du Chili. La charlotte, surtout, la charlotte qu'elle avait passé toute la soirée de la veille à confectionner, et qui attendait, au frigo, sur la dernière étagère, dans son costume de biscuits roses de Reims, cravatée de framboises surgelées. [...]
 
Suite du récit sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com
 
***
Lien vers "The Human voice" ("La Voix humaine") interprété par Ingrid Bergman : https://www.youtube.com/watch?v=vgeC02jaKVw

Publié dans Récits et nouvelles

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ça tient à rien

Publié le par Carole

ca-tient-a-rien.jpg
 
Vu en passant tout à l'heure à la bibliothèque ce livre démodé - le Comte Kostia-, sculpturalement relu et philosophiquement replié par Stéphanie Gerbaud.
"Ça tient à rien", expliquait l'artiste, "les pages sculptées en forme de coeur sont uniquement maintenues dans cette position par les deux brindilles de bois. Si elles ne sont plus assez solides ou si l'une d'elle vacille, c'est l'ensemble de l'édifice amoureux qui sera détruit".
Je me suis penchée sur l'étagère. En effet, ça tenait à rien derrière la vitre, ce drôle de roman mis en pli. À rien ? mais à quoi exactement ? À deux bouts de bois, un vieux bouquin, deux trous vrillés dans l'épaisseur du papier et puis, surtout, au coeur battant pas essoufflé d'un petit paquet de pages vieillissantes.Et ça tenait bien finalement, en tout cas pas si mal, et depuis tout un an, ces petits riens accumulés. Ça tenait, c'est sûr, à pas grand chose : à la confiance, à la volonté, à l'habitude, à l'attente, au talent, au désir, aux bons soins de l'artiste.
Que ça tienne à rien, c'est vrai rien n'est plus vrai... ça tient à rien, un édifice amoureux, un roman de nos amours, ça tient à rien, à presque rien. Et pourtant, ça arrive, non, que ça tienne ? À rien. À presque rien. À pas grand chose à pas si peu.
 

 

Publié dans Fables

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La poule

Publié le par Carole

    Une pauvre petite poulette, je vous dis, une pauvre petite poulette. Elle avait tellement souffert.
    Ici, on a l’habitude pourtant.
    Mais elle… elle, c’était pire que tout. Pire que nous tous. Jamais j’avais vu quelqu’un souffrir comme elle. Jamais. Même ici. Parce que, elle, pauvre tendre colombe, pauvre douce colombe… y avait plus de mots pour dire sa souffrance. Plus de mots. Elle avait perdu les mots. Essayez seulement d'imaginer. Une âme close. C'est terrible, une âme close. [...]
 
Suite du récit à lire sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com

 

 

Publié dans Récits et nouvelles

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Pierres vives

Publié le par Carole

Drouauto-1847.jpg
 
Visiter le château de Chambord en plein mois de décembre, c'est oublier l'envolée vers le ciel des clochetons légers, oublier les perspectives immenses sur les chemins géométriques et les canaux miroitants, pour se confronter aux pierres.
Je n'avais jamais remarqué à quel point elles parlent et appellent, dans ce vieux château des courants d'air. C'est, de mur en mur, un incessant bruissement de noms et de dates, inscrits partout, tatoués en graffitis si denses et obstinés qu'ils sont comme une deuxième peau posée toute vivante sur les écailles éteintes de l'ancienne salamandre. 
 
Je les ai salués au passage, un par un, comme des camarades d'aujourd'hui, ces inconnus d'autrefois qui burinèrent un peu d'éternité sur le tuffeau des rois.
 
— Merci, Drouauto de 1841, qui pris soin de poser la virgule pour t'adresser à nous.
 
— Salut, Hillaire Renard de 1694 veillant droit et stoïque comme un soldat romain.
 
Hillaire-Renard---1694.jpg
 
— La paix soit avec toi, Houblon de 1687 resté planté tremblant sur le tuffeau rongé comme tige fanée sur la plaine d'hiver.
 
Houblon-1697.jpg
 
— Et toi, Bigot de 1797, et toi encore, Jules de Trist, adieu, adieu à vous, néoclassiques et raides comme des fauteuils directoires.
 
Bigot---De-trist.jpg
 
— Bien le bonjour, Bourat de 1659, toi le valet, l'humble laborieux qui savais si peu écrire que tu traçais tes chiffres à l'envers - mais si profond.
 
Bourat---1659.jpg
 
Un "graffiteur" du passé vaut-il mieux qu'un "tagueur" d'aujourd'hui ? Est-il plus insensé de vouloir tracer sur la pierre d'un château un nom qui doit mourir que de poser sur l'eau d'un marécage un grand château de pierre fiévreusement couronné de F et de salamandres galopantes ?
Je ne sais pas. Mais je n'ai pas pu m'empêcher en lisant sur les pierres du château tous ces noms d'hommes encore si proches et si vivants, de penser à celui qui refusait d'inscrire dans son "livre de vie "les "bâtisseurs de pierres mortes". Et qui disait : "Je ne bâtis que pierres vives, ce sont hommes."
 
 

 

Publié dans Blois

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Doux

Publié le par Carole

doux-version-3.jpg
 
Qu'il soit doux, ce Noël, qu'il soit naïf et beau
Qu'il batte d'espérance comme l'aile d'un ange.
Qu'il joue son air de joie sur le petit banjo
À cordes de nuages à plumage d'enfance
Qui fait danser le monde et fait tourner les ombres.
Si les hommes sont fous, s'ils hurlent avec les loups
Qu'il soit bon, ce Noël, qu'il soit bleu dans le sombre,
À l'envers, à l'endroit, qu'il soit doux, qu'il soit doux.
 

Publié dans Divers

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Un ange à la fenêtre

Publié le par Carole

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Fenêtre - Château de Chaumont
 
 
Parfois, cela arrive, tu vois un ange à la fenêtre.
Il te fait signe et tu lui dis que non,
Mais aucun ange ne renonce jamais.
 A la vitre il appelle, il continue à te faire signe,
Jusqu'à ce que tu t'approches.
Et c'est alors que tout commence.
Ou que tout se finit, c'est selon.
Car déjà tu t'envoles
Aux côtés de ton ange.
Il continue à te faire signe tu le suis sans comprendre.
Tes ailes neuves te gênent un peu.
Tu ne sais où tu vas
Peut-être vers la vie
Peut-être vers la mort
Peut-être nulle part.
 
 
Il y avait un ange à la fenêtre. L'ange était lumineux. La pièce était obscure. Le grand ciel s'enroulait sur les ailes de l'ange. Le jour cognait aux vitres comme un oiseau perdu.
 
Il m'est venu cette question, de Noël ou d'ailleurs, de maintenant ou de jamais, de nulle part ou bien d'ici : regarder l'ange à la fenêtre, laisser le jour entrer par la vitre des rêves, s'envoler immobile sur les ailes qui battent les cartes de l'espoir, est-ce un moyen d'y voir plus clair et de s'en aller loin, ou bien est-ce au contraire se condamner à l'obscurcir encore, la pièce étroite et sombre où il nous faut bien vivre ?
 
Mais je suppose qu'il y a autant de réponses à ma question qu'il y a d'anges, gardiens ou reclus, à la fenêtre de nos vies.
 

 

Publié dans Fables

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La fontaine

Publié le par Carole

Fontaine Wallace - Guirlande
   Fontaine Wallace - Place de la Bourse - Nantes - 22 décembre 2014 à 16h30
 
 
Il y a longtemps que je souhaitais vous parler de ces fontaines de bronze. On les appelle "fontaines Wallace", parce que qu'un philanthrope nommé Wallace les a offertes un jour aux pauvres gens des villes. C'était après la guerre de 70 et le siège de Paris, quand l'eau manquait aux humbles, et c'était une belle action, de celles qui rafraîchissent et retrempent à sa source le coeur desséché d'égoïsme de notre âge de fer.
Mais qui prête encore attention à ces vieilles fontaines détrônées par chaque robinet ? Qui donc s'intéresse aujourd'hui à ces athlétiques cariatides portant sur leurs épaules tout le poids de Bonté, Simplicité, Sobriété et Charité ?
 
Pourtant, cette année, c'est arrivé comme un petit miracle : quelqu'un a honoré d'une guirlande notre fontaine Wallace de la place de la Bourse.
 
La guirlande est modeste, alourdie de sequins comme une Esméralda. Elle penche un peu du côté de Bonté - celle qui a les yeux ouverts.
Et vraiment c'est si beau, cette pauvre guirlande, sur le bronze sévère, c'est si généreusement vivant, cette ficelle rouge, face au vieux palais de la Bourse devenu temple du commerce, qu'on croirait que l'esprit de Noël vient de se poser là comme un oiseau, pour boire, en sans-abri qu'il est, au mince filet d'eau de l'ancienne fontaine.
 
***
 
Hier soir, j'ai écrit ce texte. Et, ce matin, j'apprends qu'un automobiliste "fou", fonçant dans cette rue que borde la fontaine, trois heures exactement après que j'ai pris ma photo, a fauché dix personnes au marché de Noël, qui se tenait tout près.
La guirlande s'est tachée de sang. Les cariatides sombres emportent le cercueil des espérances mortes.
Et l'oiseau de Noël s'est envolé au loin dans la fureur du monde où se perd son chemin.
 
Fontaine, donne-nous encore à boire de ton eau qui ne se lasse pas. Ne va pas, surtout pas, ne va pas t'assécher.
 

Publié dans Nantes

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Nativité

Publié le par Carole

    J'ai jamais su d'où qu'ils étaient venus ni pourquoi. A mon avis, ils avaient été chassés de quelque part.
    Je les ai vus arriver à pied avec leurs drôles de vêtements démodés et leurs sacs en plastique. C'était juste la veille de Noël. Ils tournaient en rond, ils se décidaient pas. Ils avaient peut-être un peu peur, parce qu'ils voyaient bien que je les avais vus. Finalement comme la nuit tombait, et qu'il fallait bien qu'ils se décident à pas cher, ils ont poussé la porte de la vieille maison et ils se sont installés.
    "Ils vont pas avoir chaud là-dedans, j'ai pensé, vu que c'est abandonné en ruines depuis plus de dix ans, et qu'y a un arbre qui pousse dans la porte qu'on peut plus la fermer vraiment et qu'elle reste toujours à moitié ouverte." [...]
 
Suite du récit à lire sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com
 

Publié dans Récits et nouvelles

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Sapin

Publié le par Carole

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Le lego restera toujours, pour ceux qui ont été enfants à partir des années 70, le symbole du possible et de la création. De ce qu'on peut bâtir de vaste et d'étonnant avec de simples briques. Des ramifications sans fin d'une idée qui grandit. Des blocs empilés solidaires toujours si solitaires dans leurs couleurs en joie. De la fantaisie se hissant d'angle en angle sur l'échelle de raison.

Toujours on perdait les plans, et on jetait les boîtes. Le lego se cherchait dans les doigts maladroits qui inventaient des mondes.


Alors quand j'ai vu ce petit sapin de lego bien solide tout là-haut comme au ciel, accroché en couleurs sur le béton et le fer et les poutres et les chaînes, il m'a semblé que c'était vraiment lui le sapin de Noël.

 


Publié dans Fables

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Une vieille cour

Publié le par Carole

   vénus - hôtel de la Villestreux
 
On faisait des travaux dans le vieil immeuble, île Feydeau. J'en ai profité pour me glisser à l'intérieur par la porte laissée ouverte  – j'ai toujours beaucoup de curiosité pour ces cours humides et sombres qui ont l'air de dormir, profondes comme des puits, entre les murs disjoints des vieux hôtels de Loire vacillant sur le sable.
La cour était emplie de dieux moussus, semblables à ces figures de proue qu'emportaient autrefois les navires pour tracer leur chemin. Usés d'avoir roulé sur la pente des siècles comme pierre qui mousse, ils ouvraient cependant sur cette ombre leurs grands yeux claivoyants.
Une Vénus nattée de vert rêvait dans sa coquille à l'océan là-bas.
Et lui, l'Apollon adouci de patine comme un vieil ostensoir, il rayonnait encore, tout noirci qu'il était.
 
apollon---hotel-de-la-Villestreux.jpg
 
Je me suis souvenue soudain que c'était ici, le fameux hôtel de la Villestreux où Carrier s'était logé, pendant la Terreur. Près de cette Vénus, il avait médité exécutions, noyades et sentences insensées. Sous ce bel Apollon, le monde s'était trempé de sang, de boue, et de dégoût.
 
Lumières : en ce lieu vous vous êtes éteintes. Et en ce lieu pourtant, sur les sables du fleuve, des dieux veillaient, vieillissant à la proue d'avenir, à vous faire traverser le temps, avec vos flammes vives toutes adoucies de mousses.
 
Les murs s'imprègnent-ils vraiment, toujours et pour toujours, des crimes et des pensées sinistres qui les ont entachés ? Certains n'ont-ils pas quelquefois le pouvoir, secret comme l'espoir, vaste comme la vie, de tout filtrer et de tout purifier pour nous donner à voir, dans leurs grands puits profonds, le chemin différent qui pourrait commencer ?
 

 

Publié dans Nantes

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